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Abrogation implicite d’un arrêté d'interruption des travaux à la suite de l’intervention d'un permis de construire modificatif régularisant les travaux litigieux

Public - Urbanisme
28/10/2019

► L’abrogation implicite d’un arrêté d'interruption des travaux à la suite de l’intervention d'un permis de construire modificatif régularisant les travaux litigieux a pour conséquence l’irrecevabilité du référé-suspension introduit postérieurement contre cet arrêté.

Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 16 octobre 2019 (CE 9° et 10° ch.-r., 16 octobre 2019, n° 423275, mentionné aux tables du recueil Lebon).

Contexte. L'article L. 480-2 du Code de l'urbanisme dispose que : "[...] dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 du présent code a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux [...] Dans le cas de constructions sans permis de construire ou d'aménagement sans permis d'aménager, ou de constructions ou d'aménagement poursuivis malgré une décision de la juridiction administrative suspendant le permis de construire ou le permis d'aménager, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens [...]».

Le maire peut ainsi pallier la lenteur ou la déficience du ministère public et prendre une mesure conservatoire permettant de faire cesser la progression de l’infraction, dès lors que celle-ci est déjà constituée mais qu’elle progresse et se renforce dans le temps au fur et à mesure de la progression des travaux illégaux.

La décision d’interruption des travaux dépend de l’établissement du procès-verbal qui est une condition sine qua non de la légalité de l’arrêté d’interruption des travaux : le récépissé de dépôt de plainte du maire ne peut remplacer le procès-verbal d’infraction (CE, 10 janvier 1996, n° 125314).

La décision d’interruption des travaux, qui n’a pas à être motivée par l’urgence (CE, 15 avril 1992, n° 67407 est au nombre des mesures de police qui doivent être motivées en application de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, et ne peut intervenir qu'après que son destinataire a été mis à même de présenter ses observations, sauf en cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles (CE, 10 mars 2010, n° 324076.

Application. Après l'intervention le 5 octobre 2017 d'un arrêté du maire ordonnant l'interruption des travaux entrepris par le requérant au motif que ces travaux étaient effectués en méconnaissance du permis de construire initial délivré à l'intéressé le 10 août 2016, le maire a délivré à l’intéressé, par un arrêté du 27 novembre 2017, un permis de construire modificatif régularisant au moins partie des travaux en cause.

L'intervention du permis de construire modificatif a eu implicitement, mais nécessairement, pour effet d'abroger l'arrêté ordonnant l'interruption des travaux.

Il s'ensuit que la demande de référé tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté interruptif de travaux, présentée alors que cet arrêté devait être regardé comme implicitement abrogé, était dépourvue d'objet et, en conséquence, irrecevable (cf. l'Ouvrage "Droit de l'urbanisme").

 

Yann Le Foll

Source : Actualités du droit