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Comment prouver un prêt d’argent sans reconnaissance de dette ?

Civil - Contrat
01/10/2019
Un commencement de preuve, tel un courrier électronique, n’est pas suffisant, rappelle la Cour de cassation, dans un arrêt du 26 septembre 2019.
Un particulier qui prête une somme d’argent peut avoir des difficultés à en obtenir le remboursement en cas de mauvaise foi de l’emprunteur. Un arrêt du 26 septembre 2019 vient illustrer cette situation malheureusement courante.

Trois textes du Code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, encadrent la preuve d’un acte tel un prêt :
  • « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation »  (C. civ., art. 1315, devenu art. 1353) ;
  • un écrit est indispensable pour constater un emprunt d’une valeur supérieure à 1 500 euros (C. civ., art. 1341, devenu art. 1359) ;
  • ces règles reçoivent exception lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit (tout acte par écrit émanant de celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu'il représente, et qui rend vraisemblable le fait allégué ; C. civ. art. 1347, devenu art. 1361).
Dans l’affaire jugée ici, Monsieur R. prête à Monsieur B. la somme de 18 000 euros. Monsieur B n’ayant remboursé qu’une partie du prêt, le prêteur l’assigne en remboursement du solde, soit 10 000 euros. Monsieur B conteste l’existence même du prêt, faisant valoir qu’aucun contrat ne l’avait jamais lié à Monsieur R. Il est pourtant condamné en appel à payer cette somme au demandeur, la cour ayant retenu qu’un courrier électronique valait reconnaissance de la dette qu’il avait contractée personnellement.
Il se pourvoit en cassation. Il invoque la règle de la charge de la preuve, à savoir que c’est à celui qui réclame le remboursement d’une somme remise à titre de prêt qu’il incombe d’établir d’une part, la remise des fonds au profit du défendeur et, d’autre part, que cette remise est intervenue à titre de prêt.

La Haute juridiction casse l’arrêt : « en se fondant sur cet élément (ndlr : le courrier électronique), constituant un commencement de preuve par écrit du prêt litigieux, sans constater l’existence d’éléments extrinsèques propres à le corroborer, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ».

Le prêteur, pour prouver la réalité du prêt, doit compléter le commencement de preuve par tous moyens tels que des témoignages ou des présomptions, des documents comptables, des manuscrits, etc. Encore faut-il avoir conservé ces documents... D'où l’intérêt d’une reconnaissance de dette qui permet au particulier qui a prêté de l'argent :
  • d’en obtenir le remboursement sans avoir à prouver la remise des fonds au débiteur, celle-ci étant présumée (Cass. 1re civ., 30 oct. 2008, n° 07-12.638).
  • de solliciter judiciairement le paiement des sommes dues (Cass. 1re civ., 14 janv. 2010, n° 08-18.581).
Source : Actualités du droit